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La sexualité, en avoir ou pas ?

Dernière mise à jour : 21 nov. 2023

Que l'on s'abstienne de sexe ou que l'on en consomme, on est toujours pris dedans. On est toujours pris dans la sexualité. Cette sexualité est-elle aussi essentielle que ce que l'on dit ? Comment la vit-on aujourd'hui, que ce soit au sein du couple ou avec des partenaires occasionnels ?


A l'heure où 1 Américain sur 4 préfère regarder Netflix plutôt que de faire l'amour ; à l'heure où 1 Suédoise sur 3 déclarait encore en 2010 préférer pratiquer la course à pied que de baiser ; à l'heure où la moyenne nationale est de 2,5 rapports sexuels en moyenne par semaine, qu'en est-il de la place et de l'importance de la sexualité aujourd'hui ? Qu'est-ce que vivre avec une sexualité et vivre sans sexualité ? Est-ce la même chose pour un homme que pour une femme ?

Qu'est-ce que vivre avec une sexualité et vivre sans sexualité ? Est-ce la même chose pour un homme que pour une femme ?

L'émission "La Série Documentaire" de France Culture a dédié 4 épisodes à cette question, dans une série intitulée "Vivre sans sexualité", élaborée par Ovidie et Tancrède Ramonet.

choisi de vous présenter ici 2 de ces épisodes qui me semblent résonner avec ce que je vis en cabinet, que ce soit en thérapie de couple, en thérapie de groupe ou en thérapie individuelle. Parce que l'absence de sexualité peut être vécue comme une décision intime ou politique, elle peut aussi être synonyme de souffrance, de tristesse et de solitude.


Episode 1 : "Sexualités empêchées"

Podcast : Episode 1 : "Sexualités empêchées"


Que se passe-t-il quand l'absence de sexualité est une situation subie ?

Extraits :

"Si on parle en termes de physiologie, le besoin sexuel, ça n'existe pas."
"Si moi en tant qu'homme je ne fais pas l'amour d'un jour, d'une semaine, d'un mois, d'une année, de toute ma vie, il n'y a rien qui se produit. (...) Notre organisme s'adapte". (Philippe Brenot, psychiatre, sexologue et anthropologue)

Si la sexualité n'est pas un besoin, l'absence de sexe n'en est pas moins source de souffrance.

"Entre 23 ans et 31 ans, j'ai touché une femme."
"Ce qui me manque le plus ? La sensualité, la beauté de la sensualité. (...) Ça remet en question plus la façon dont je suis que le comportement des femmes par rapport à moi. Je me dis que si j'étais un peu autre, mais juste un petit peu plus autre, ça se passerait nettement différemment". (François Nombret, essayiste, poète)

Emmanuelle Richard, dans son ouvrage Les corps abstinents, a enquêté sur les personnes qui ne font plus l'amour, alors qu'elle traversait elle-même une période d'abstinence suite à une rupture douloureuse :

"Le manque commun à tous, c'est le manque de toucher mais pas du tout circonscrit au domaine de la sexualité. Le simple contact ou la possibilité d'étreinte : ce manque-là est dévorant, extrêmement dur".

Et dans des environnements fermés comme la prison ? Jacques Lesage De La Haye, psychanalyste, ancien détenu de longue peine, auteur de L'Homme de métal, décrit la réalité d'une sexualité en milieu carcéral à la fois déniée et obsessionnelle :

"C'est un sujet tabou la sexualité. Si tu parles de sexualité, c'est que tu es un peu PD quand même, un mouchard, une balance, un obsédé sexuel, un criminel sexuel, c'est presque pareil. C'est un peu des sous-hommes. Donc on en parle pas parce qu'on est des mecs".

Lorsque c'est dans son propre corps que l'on est enfermé, à cause d'une maladie ou d'un handicap, peut se poser la question de l'assistance sexuelle des personnes handicapées qui reste encore un tabou en France. A ce sujet, l'APPAS - Association pour la promotion de l'accompagnement sexuel, travaille à défendre le droit pour les personnes handicapées à satisfaire leur manque affectif et sexuel, et à les aider à vivre au mieux leur corps et leur sensualité.

"Il ne faut pas cantonner un rapport sexuel à la pénétration. Si on sort de cette injonction à la pénétration, on peut avoir une vie sexuelle totalement épanouie jusqu'à la fin de ses jours". (Marc Galiano, chirurgien, urologue et endrologue)
"Il ne faut pas cantonner un rapport sexuel à la pénétration. Si on sort de cette injonction à la pénétration, on peut avoir une vie sexuelle totalement épanouie jusqu'à la fin de ses jours".                                                                                  (Marc Galiano, chirurgien, urologue et endrologue)


Episode 2 : "L'absence de sexualité, une anomalie sociale"

Podcast : Episode 2 : "L'absence de sexualité, une anomalie sociale"


A l'inverse, que se passe-t-il quand l'absence de sexualité est une situation choisie ? Comment est-elle vécue et perçue dans une société de surconsommation et de performance du sexe ?

Extraits :

"On peut se sentir un peu nulle quand on ne fait pas l'amour. C'est comme si vous alliez au sport d'hiver avec des gens, et vous, vous ne savez pas skier. Vous vous sentez nulle en fait".

La publication de L'Envie de Sophie Fontanel en 2011 a été l'occasion d'aborder l'abstinence sexuelle comme un choix libre, où la sublimation (ici dans l'écriture) devient source de plaisir et de satisfaction.

Je me permets ici de poser la question de l'impact de l'agression sexuelle dont l'auteur a été victime adolescente, et des séquelles traumatiques, affectives et sexuelles qui ont pu en résulter, dans son choix d'abstinence sexuelle.

"En vrai, j'ai fait l'amour dans ma vie au milieu d'énormes moments où je ne le faisais pas."
"J'ai été abusée quand j'avais 15-16 ans et si je n'avais pas sublimé (dans l'écriture), déjà que ça a stoppé chez moi beaucoup de choses, je serais morte, je me serais pendue".
"Soit j'arrivais à prendre un plaisir, mais je n'étais pas amoureuse ; soit j'étais amoureuse et ça ne se faisait pas".(Sophie Fontanel, auteur)

Et qu'en est-il de l'abstinence sexuelle au sein du couple ? Est-ce que c'est normal docteur ?

"Enormément de couples sont abstinents. 1/3 des couples ne font pas l'amour, c'est-à-dire 0 ou quelques fois par an. Des couples qui ne font plus l'amour depuis des années, on en voit tous les jours mais ils ne vont pas parler d'abstinence, dans la mesure où il y a autre chose dans la relation". (Philippe Brenot, psychiatre, sexologue et anthropologue)

Le décalage est ainsi réel entre l'image de sexualité idéalisée véhiculée par la société et ce qui est vécu. Comment vivre sa sexualité dans un environnement hypersexualisé, qui se doit d'être performant et satisfaisant ? Finalement, comme le pose Juliette Dragon, fondatrice de l'Ecole des filles de joie :

"C'est quoi baiser ? C'est quoi la sexualité ? "
"Aujourd'hui, si je fais du sexe avec quelqu'un, j'ai envie que ce soit aussi excitant intellectuellement.(...) J'ai envie d'une connexion, d'une présence.(...) J'ai l'impression qu'on peut réinventer le rapport intime ; en tout cas la pénétration, si elle est délicieuse, à mon sens elle ne suffit pas. On peut avoir énormément de plaisir sans génitalité".

La sexualité interroge énormément de choses en soi et dans sa relation à l'autre : rapport au corps et au corps de l'autre, au plaisir, au désir, à l'abandon, aux fantasmes, aux jeux de rôles, à l'excitation, à l'orgasme, aux caresses, et parfois aussi à la culpabilité, à la honte ou à la frustration. La sexualité, c'est le lieu de l'intime, un langage à part entière qui requiert parfois plusieurs années avant d'apprendre à le parler. Ou d'oser le faire. Et c'est bien là que résident sa richesse et sa beauté. A chacune et à chacun le droit de prendre son temps pour découvrir sa sexualité, celle de son partenaire et de s'autoriser à la vivre comme on en a envie. Avec liberté, joie et simplicité.


Que ce soit en thérapie individuelle, en thérapie de couple ou en thérapie de groupe, sentez-vous libre de parler de votre sexualité, en toute liberté et en toute sécurité.


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