Criminologie

C’est quoi la criminologie ?
La criminologie est l’étude du phénomène criminel. A la croisée des sciences humaines, des sciences sociales et du droit, la criminologie est une discipline relativement récente qui couvre principalement le droit pénal, la criminalistique, le droit pénitentiaire, la pénologie, la procédure pénale, l’anthropologie criminelle, la médecine légale, la victimologie et la psychologie criminelle ou psychocriminologie. Alors, de quoi s’agit-il exactement ?
Dans leur ouvrage Droit pénal et criminologie, Robert Vouin et Jacques Leaute définissent la criminologie comme « l'étude scientifique du phénomène criminel ». Dans le Que sais-je ? sur la criminologie, Georges Picca explique que cette discipline consiste à « analyser, suivant une méthode scientifique - c'est-à-dire objective -, le fait social que constitue la criminalité, ainsi que la personnalité des auteurs de crimes ». Dans les Mémentos Dalloz Criminologie et science pénitentiaire, Jean Larguier précise que la criminologie est « la recherche des causes et l'examen des manifestations de la délinquance, ainsi que l'étude du criminel, de l'acte criminel et de la réaction sociale contre le crime, la politique criminelle permettant alors de mieux lutter contre celui-ci ». Enfin, dans l’un des ouvrages de référence Criminologie, Raymond Gassin, Sylvie Cimamonti et Philippe Bonfils parlent d’« une science qui étudie les facteurs et les processus de l’action criminelle et qui détermine, à partir de la connaissance de ces facteurs et de ces processus, les moyens de lutte les meilleurs pour contenir et si possible réduire ce mal social ». Ainsi, à chaque auteur sa définition, ce qui rend compte de la multitude de courants et d’approches qui existent en criminologie, suivant le paradigme choisi : le délit, le délinquant, le passage à l’acte, la réaction sociale, la politique criminelle, etc.
Pour rendre compte au mieux de ce qu’est la criminologie, et de ce qu’elle couvre comme périmètre d’intervention, nous retiendrons ici la définition de Jean Larguier qui évoque une « science de constatation ». Celle-ci se concentre alors sur l’analyse des faits, à partir d’une méthode empirique, décrit la conduite criminelle, recherche les causes du crime et étudie le criminel. La criminologie peut être ainsi appréhendée comme la science du crime et des délinquants à l'origine de ces crimes.
Contrairement au Canada, il n’existe en France aucun ordre professionnel propre à la criminologie. Les organisations spécialisées sont rares, et celles qui existent semblent moins dynamiques, que ce soit en criminologie appliquée ou en recherche criminologique. En France, l’Association Française de Criminologie (AFC Criminologie), créée en 1965, se présente davantage comme un forum ouvert à échanges et discussions auprès du grand public qu’à une association professionnelle initiatrice de recherches, de publications, participant à structurer un métier dont les contours restent à définir. L’existence de cette association est importante et promeut la réalité des questions de criminologie mais ne saurait suffire à l’élaboration d’un domaine d’expertise construit, établi et reconnu en tant que tel. La présence francophone semble davantage assurée par l’Association Internationale des Criminologues de Langue Française (AICLF), rattachée à l’École des Sciences Criminelles de l’Université de Lausanne en Suisse, qui est notamment partenaire de la Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique. Elle crée un lien entre universitaires, chercheurs et praticiens en criminologie de langue francophone, autour de publications et d’organisations de colloques. Ce rôle en France reste à ce jour dévolu aux associations d’étudiants et d’universitaires, comme l’Association des étudiants en psychocriminologie et victimologie de l’Université Rennes 2 (AEPCVR2).
Aujourd’hui, la criminologie en France s’illustre selon trois axes principaux :
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La formation universitaire en criminologie, en psychocriminologie et en victimologie
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L’intégration de psychologues spécialisés en criminologie en milieu pénitentiaire, médico-judiciaire et de protection de l’enfance / de la jeunesse
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L’intégration de psychologues spécialisés en criminologie dans des équipes pluridisciplinaires de police judiciaire, en Police et en Gendarmerie.
L’offre de formation évolue au fur et à mesure que l’intérêt pour le domaine de recherche et d’application s’accroît. La plupart des universités françaises proposent aujourd’hui des cursus spécialisés en criminologie, en particulier au travers de Diplômes Universitaires (DU) équivalents à une Licence. Une spécialisation peut être également réalisée, le plus souvent en Master I ou Master II, sur les parcours en psychologie et en droit pénal. A Paris, l’Institut de Criminologie et de Droit pénal de Paris (ICP) de l’Université Paris II Panthéon-Assas présente ainsi cette répartition de cursus:
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Certificat de sciences criminologiques
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Certificat de sciences criminelles
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Master II Droit pénal et sciences criminelles - Parcours Criminologie.
Si l’inconvénient réside dans la multiplicité des formations sans ordre professionnel français, et donc sans critères précis des connaissances et compétences requises pour exercer en tant que criminologue, il subsiste tout de même un avantage : celui de créer son propre parcours, tant universitaire que professionnel, et de se spécialiser dans un ou plusieurs domaines clés. Ainsi, les cursus en victimologie ou en psychocriminologie, qui sont proposés depuis 3 ou 4 ans par certaines universités, peuvent compléter un diplôme en criminologie.
A ce jour, une formation en psychologie clinique et en criminologie constitue le cœur de la qualification requise pour candidater à un poste de criminologue dans les services d’enquête judiciaire. Il est fort à parier qu’à court terme, des profils plus variés, transverses et pluridisciplinaires seront recherchés, pour répondre aux besoins face à l’évolution et à la spécification de certains types de criminalités, comme la criminalité cyber par exemple.

La criminologie en France

Le métier de criminologue en France
Le métier de criminologue en France comme activité professionnelle n’existe pas. La criminologie est considérée comme une spécialisation uniquement. Cependant, cette réalité tend à évoluer depuis quelques années, et les criminologues commencent à faire leur apparition dans certaines équipes pluridisciplinaires de police judiciaire au sein de la Police comme de la Gendarmerie.
Si au Canada, l’exercice professionnel du métier y est pleinement reconnu, notamment à travers l’OPCQ – l’Ordre Professionnel des Criminologues du Québec, et l’offre de formation plus structurée, comme l’illustre l’École de Criminologie de l’Université de Montréal, la France commence tout juste à accueillir le criminologue comme un professionnel à part entière, doté d’une expertise, de compétences spécifiques, d’une déontologie et d’une méthodologie propres, et à l’intégrer dans des équipes transverses et multidisciplinaires où il a toute sa place et sa légitimité. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour que le criminologue soit reconnu comme un métier à part entière.
Les fantasmes autour de la figure du criminologue s’entendent régulièrement de-ci de-là, nécessitant un recadrage sur son rôle et son périmètre d’intervention : désolée, mais le criminologue n’est pas un profiler du dimanche ! Non. Le criminologue a avant tout une solide connaissance en droit pénal et en pénologie, avant éventuellement de se spécialiser en psychologie criminelle ou en psychiatrie criminelle. C’est un point important, car il dessine les contours de son cadre de travail, de sa méthodologie et de ses apports au cours d’enquêtes criminelles menées sous la responsabilité des officiers de police judiciaire. Le criminologue propose des pistes et des hypothèses de travail, et identifie les traits d’un profil d’auteur afin d’aider à son identification. Ses propositions, suivies ou non par les enquêteurs au cours de l’instruction, sont rassemblées dans un rapport spécifique qui fera partie intégrante du dossier d’instruction transmis au Parquet.
La série Profilage est intéressante, en ceci qu’elle a participé à faire connaître le métier de criminologue et de psychocriminologue en France. Au sein de la 3ème DPJ de Paris, une psychocriminologue est intégrée au sein de la Brigade Criminelle et participe aux enquêtes aux côtés du groupe sous les ordres du Commandant Mathieu (Saisons 1 et 2), remplacé par le Commandant Rocher (à partir de la saison 3). Si les personnages mettant en scène les psychocriminologues, Chloé Saint-Laurent puis Adèle Delettre, ont leur part de fiction et de transgression, leur rôle, leur méthode de travail et leur contribution aux enquêtes criminelles ont donné une belle visibilité dans le sérail français sur le métier et l’exercice criminologique. La série a également permis de s’extraire des fictions américaines telles que Esprits Criminels, certes passionnantes mais loin de la réalité du terrain hexagonal. Il est évident que la participation, en tant que consultante sur la série, de la criminologue française Michèle Agrapart-Delmas a eu une forte valeur ajoutée dans la démystification de la figure du criminologue et l’illustration de ce qu’est la réalité quotidienne de son métier.
Dans tous les cas, il est intéressant de constater que bon nombre de diplômes et de formations ont vu et voient encore le jour suite à la diffusion et au succès de cette série française, tout comme l’intérêt grandissant des étudiants, des chercheurs, des professionnels du monde judiciaire, pénitentiaire ou expertal pour les domaines de la criminologie et de la psychocriminologie. Comment cet intérêt se traduit-il concrètement ?
Si l’on met de côté les psychologues spécialisés en criminologie qui interviennent en milieu pénitentiaire, médico-judiciaire et en protection de l’enfance, au titre de psychologue, il reste encore beaucoup de travail pour exercer au titre de criminologue, et surtout pour faire reconnaître la légitimité et la pertinence du métier. Le criminologue, en tant qu’expert du phénomène criminel, est un professionnel qui a toute sa place tant dans l’enquête criminelle et l’investigation judiciaire, qu’au cours d’une expertise pénale et d’un travail de profilage criminel. C’est désormais le cas dans certains services de police judiciaire de la Gendarmerie Nationale et de la Police Nationale, et principalement :
La série française Profilage (10 saisons) diffusée sur TF1 de 2009 à 2020, produite par Stéphane Marsil
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L’Office Central pour la Répression des Violences aux Personnes s’est notamment doté depuis 2007 d’une équipe de psychocriminologues qui met à la disposition des différents groupes d'enquête ses compétences et ses expertises en analyse criminelle. Pour avoir un aperçu du travail effectué par l’équipe, lire Les psychologues du crime de Florent Gathérias et d’Emma Oliveira.
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